
Ils attendent, déferlants, rugissants, mugissants, en piles abondantes, en monceaux affolants, en cascades bouillonnantes. Ils attendent, académiques et rangés, en première ligne ou bien cachés derrière les premiers d’alphabet. Ils attendent, pleins d’encre, de sang, de femmes et d’hommes, d’idées bruissantes, d’imbécillités inutiles et merveilleuses, de merveilles époustouflantes, d’avalanches d’évidences et de quelques étoiles. Ils attendent, classés par coeur, rangés en piles, empilés avec grâce ou bien rencognés avec détestation. Embusqués dans mes mémoires, tapis dans les savanes de mon éducation, toujours sur mes traces quoi que j’y fasse, ils attendent. Ils attendent et ils se souviennent des enfers, des autodafés, des pages blanches ou bien arrachées, des lectures interdites, des cornes, des notes et des doigts mouillés, des coeurs brisés et des larmes bues par le papier. Ils attendent toujours de nouveaux yeux d’enfants, de nouvelles âmes, de nouvelles bouches murmurant leur amour, de doigts précis sur leurs courbes indécises. Ils attendent qu’on les serre sur son coeur ou bien qu’on les balance à l’autre bout de la pièce, qu’on les use ou bien qu’on les subtilise. Ils attendent d’être. Si vous saviez comme ils vous attendent…
