
Il y a fort longtemps, avant que l’homme blanc ne vienne envahir les Amériques et détruisent les civilisations indiennes, vivaient les Sioux, les Apaches, les Commanches, les Mohicans et d’autres peuples indiens.
Ces peuples vivaient en harmonie avec la terre qui leur procurait tout ce dont ils avaient besoin : nourriture, eau, soleil, culture, animaux. Les hommes des tribus chassaient et pêchaient. Les femmes cultivaient le maïs et d’autres céréales, s’occupaient de recueillir l’eau, de préparer les repas et d’éduquer des enfants. Toute la vie était ponctuée de cérémonies, de fêtes ou l’on célébrait le Grand Esprit, les naissances, le passage de l’enfance à l’adolescence, les mariages, la mort.
Leur vie était simple, saine et très riche spirituellement. Respecter la nature, l’arbre, l’animal, protéger toutes les espèces, partager avec son voisin, avec la tribu tout ce que l’on possède ; mettre tout en commun et pouvoir compter sur la collectivité, était un bien considérable, un trésor qui n’avait pas de prix ! Ainsi vivaient les Sioux avant le grand déluge : la grande marée dévastatrice des blancs, venue les anéantir !
En ces temps-là, donc, vivait une fort belle jeune fille Sioux qu’on nommait « Perle de pluie », nous l’appellerons : Perle. C’était la fille du grand Chef, Aigle vaillant. Elle avait quinze ans. Toutes les jeunes filles de la tribu avaient trouvé un amoureux à épouser. Mais Perle restait seule, car nul jeune homme n’avait osé demander sa main : pour l’obtenir ,il devait se mesurer au Grand chef, son père, un colosse que personne n’avait jamais battu.
Les années passaient. Ses amies étaient déjà mères de deux petits et elle, restait désespérément seule ! Un jour, elle décida de quitter le village et l’aller à l’encontre de son destin. Elle pensait rencontrer un jeune indien d’une autre tribu qui n’aurait pas peur de son père et qui tomberait amoureux d’elle. Comme elle s’approchait d’une magnifique rivière, il lui sembla que la rivière chantait. Elle s’en approcha , se dévêtit, laissant sur la berge ses habits et ses bijoux et entra doucement dans l’eau douce et fraîche . Elle nagea et s’approcha d’une cascade. La voix semblait venir de là-bas.
Sous la cascade Perle crut distinguer l’ombre d’une dame : d’une fée , elle lui souriait et lui demanda de ramener du fond de la rivière son collier de perles qu’elle venait de perdre. Perle s’exécuta, plongea dans l’eau profonde et limpide et trouva le bijou en question. Elle le rapporta à la dame de la rivière. Cette dernière l’en remercia :
– Merci, jeune fille ! Je ne pouvais le rattraper car je ne sais pas nager. Que veux-tu pour ta récompense ?
La jeune Perle rougit et baissa les yeux.
– Eh bien ! insista la fée, Que veux- tu si fort, pour rougir autant ?
– Belle dame je désirerais me marier mais aucun homme n’est assez fort pour se battre avec mon père, le chef de toutes les tribus sioux !
– Prends un loup pour se battre contre ton père ?
– Un loup ! Mais je veux un époux et non une bête pour compagnie !
La fée lui sourit gentiment et fit apparaître aussitôt un magnifique loup blanc.
– Jeune fille voilà ton futur époux ! – Et dans un éclat de rire elle disparut .
Perle regarda le loup, effrayée ,mais elle comprit que la bête ne lui voulait aucun mal, bien au contraire :
– Je ne peux t’emmener avec moi au village car certains auraient peur de toi et te tueraient pour ta belle peau. Adieu loup ! Et vis heureux

Le loup la regarda s’ éloigner. Perle venait de marcher un long moment lorsqu’elle sentit la présence d’un danger : un lynx féroce s’apprêtait à lui sauter dessus. Elle se saisit d’un bâton, prête à défendre sa vie mais la bête sauta et s’apprêtait à la tuer quand le loup surgit et se jeta sur le lynx ,le mordant mortellement à la gorge sauvant ainsi Perle d’une mort certaine.
– Merci, Loup tu m’as sauvé la vie ! Comment te remercier ?
Dans sa lutte avec le lynx la bête s’était blessée, aussi Perle chercha-t-elle de l’eau et retourna-t-elle à la rivière pour la soigner. Encore une fois elle crut entendre la chanson de la fée, mais il n’y avait pas la fée. Perle soigna l’animal puis, tous deux épuisés s’endormirent. Lorsque Perle se réveilla le matin, le loup avait disparu . » C’est mieux ainsi « , pensa-t-elle ! Et elle reprit son chemin.
C’est là qu’elle croisa trois indiens d’une tribu hostile : des Apaches. – -Oh la la belle toute seule sans mari ni homme auprès de toi ? Perle mentit :
– Mon homme pêche plus loin !
– Petite menteuse ! Dit le plus grand d’entre eux ! Il n’y a personne. Allons vient, nous allons combler ta solitude !
– Laissez-moi ! hurla Perle ! Mon père est le grand chef des Sioux, chef de toutes les tribus ! Si vous me touchez il vous fera battre et tuer !
– Tiens ça alors ! dit un second au regard vicieux ! La fille du grand chef qui se trouve seule ici, qui dort seule ! Nous t’observons depuis des heures ! Tu veux nous faire croire que tu es Perle !
– Oui, je suis Perle ! lança t-elle le regard farouche.
Le plus jeune qui était resté muet, méfiant, ajouta :
– Et si tout ce qu’elle disait était vrai ? Si c’était bien la fille du Sioux ?
– Et pourquoi se trouverait-elle seule ici sans protection ? Ajouta le plus grand ?
– Il faut que tu aies fait quelque chose de bien mal pour t’être enfuie de ton village ! Lança t- il à Perle.
– Non ! Je suis partie me promener et je me suis perdue !
– Assez ! Hurla le plus méchant ! Je ne crois rien de tout ça ! Tu t’es enfuie, car tu ne dois pas être en paix avec toi-même ! Nous allons arranger cela ! Allez, venez-vous autres ! Assez perdu de temps

Et il se précipita sur Perle qui n’eut pas le temps de se relever. Ils l’empoignèrent et la clouèrent au sol. C’est à ce moment-là qu’apparut le loup blanc. Il se jeta sur les hommes qu’il blessa profondément. Mais le plus méchant avait eu le temps de sortir son grand couteau et de le planter dans le coeur du valeureux loup qui s’effondra.
Les trois Indiens étaient morts ainsi que la bête, Perle s’approcha du loup et se mit à pleurer. Elle tenta d’arrêter le sang qui coulait du cœur de l’animal.
– Pardon, loup, si tu es mort, c’est de ma faute !
Elle crut entendre pour la troisième fois la rivière qui chantait, et qui dansait, saupoudrant sur son lit des fleurs de nénuphars. Perle en cueillit quelques-unes et les plaça autour du loup, puis bercée par ce chant étrange, elle s’endormit. Elle devait avoir dormi des heures, lorsqu’elle sentit une main lui caresser les cheveux. Elle se redressa et vit auprès d’elle un beau jeune homme, d’une tribu indienne qu’elle ne reconnut pas. Il souriait :
– Le loup blanc ! Lui dit-elle ! Il m’a sauvé la vie !
Perle se releva, mais il n’y avait pas de trace de loup, les trois Indiens morts n’étaient plus là, eux non plus ! Elle essaya d’expliquer au beau jeune homme son aventure.
– Dans nos songes nous trouvons toujours la réponse à nos questions et à nos désirs, lui dit-il en souriant, puis la prenant par la main, il la fit monter sur son beau cheval et la ramena à son village où tous l’attendaient dans la crainte. A sa vue, la joie envahit la tribu qui la croyait morte. Le jeune homme qui venait d’une tribu bien au-delà des montagnes, demanda Perle en mariage à son père. Mais avant, suivant la tradition, il devait se mesurer à lui. C’était la coutume.

– C’est la peau de mon père que tu portes là : le plus grand chef, celui que l’on nommait « loup blanc «. Je ne me battrai pas avec toi, car tu es son esprit. Le plus fort et le plus grand de tous les chefs. Il t’a choisi pour revenir parmi nous ! Je te déclare vainqueur, proclama le père de Perle ému. À dater de ce jour, on te nommera « louveteau blanc » !
Tous éclatèrent de joie et ce fut une immense fête. Perle se maria et eut bientôt une descendance nombreuse : trois filles et trois garçons. On dit que le jour de la naissance de chaque enfant, naquit un louveteau. Ces louveteaux accompagnèrent les petits de Perle et surent les protéger de tous les dangers tout au long de leur vie. Quant à la fée, elle réapparut souvent à Perle dans ses rêves pour l’avertir des dangers qui la menaçaient ou qui menaçaient la tribu, mais aussi pour lui annoncer les bonnes nouvelles.
Et la rivière ? Chante-t-elle toujours ? On dit que du côté du Montana, il est une rivière très riche en poissons qui coule paisiblement, et que son murmure résonne sur ses pierres. Elle chante pour celles ou ceux qui cherchent dans la nature l’harmonie, la paix et qui savent respecter chaque arbre, chaque pousse, chaque oiseau, chaque habitant de la terre. Ami, si ton coeur est pur comme celui d’un enfant, alors, peut-être, pourras-tu entendre chanter la rivière !
