Fables et fabulistes : Leonard de Vinci – le Troène et le merle

Un troène, sentant sur ses subtiles rameaux, remplis de nouveaux fruits, les coups de griffes et de bec d’un merle importun, se plaignit, avec piteux reproches, de ce merle et lui demanda pourquoi il lui prenait ses fruits délicats, et au moins qu’il ne le privât pas de feuilles qui le défendaient des rayons trop chauds du soleil et que son ongle aigu n’excoriât pas sa tendre écorce. A cela le merle vilainement répondit : « Tais-toi, sauvage arbuste ! Ne sais-tu pas que la nature te fait produire ces fruits pour me nourrir ? Ne vois-tu pas que, seul au monde, je me sers de cet aliment ? Tu ne sais pas, vilain, que tu seras au prochain hiver l’aliment du feu ? » L’arbre écouta ces paroles patiemment, mais non sans larmes ; peu après le merle fut pris en des filets et on coupa des rameaux pour faire une cage et enfermer le merle ; un bout des branches forma les barreaux de cage, qui firent perdre la liberté à l’oiseau et le troène lui dit : « O merle, je suis ici, et pas encore brûlé comme tu as dit. Je te verrai en prison avant de me voir brûlé. »

(Codex Atlanticus, 67 ra, Milan, Bibliothèque Ambrosienne)

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