Isabelle Mutin – Celsius – Extrait ( Editions Mutine)

Il aura fallu que la vie s’acharne pour que je perde le fameux grand sourire dont tu te moques tendrement depuis notre rencontre. Là encore, nous sommes contraires. Le tien est timide et dévoile à peine les dents alors que le mien envahit le visage, paraissant audacieux et conquérant.
Derrière moi la conquête du monde…
Je ne sais plus te sourire. Un sourire vient d’en-dedans, c’est une résurgence de l’intérieur. On ne triche pas avec le sourire. S’il n’y a pas de joie, il vire de suite au rictus. Il doit vraiment venir du cœur pour embellir et irradier un visage. Je ne sais pas tricher, et encore moins avec toi mon amour.
Me reste quelques sourires de courtoisie, ceux qu’on apprend dès l’enfance, la politesse de base, ne pas dire bonjour en tirant la gueule, et ceux qui tentent de détourner la douleur, ou plutôt, qui essaient de la taire. Celsius m’a démasquée. Je n’avais pas remarqué que je parlais des choses graves en souriant. Une forme de pudeur et de distance que j’essaie d’instaurer. Je souris quand je parle de choses graves, je mêle le soleil à la pluie. Mais aucun arc-en-ciel ne naît de mes intempéries. La nature est, comme toujours, infiniment plus belle et magique que moi.
Je descends les escaliers et découvre, au petit matin, au bas de notre immeuble, une chose remarquable : une rose rouge a choisi d’éclore au mépris des saisons. Je la regarde, à la fois fascinée et perplexe, repensant à la phrase de Camus « Au milieu de l’hiver, j’ai découvert en moi un invincible été. » Elle en est l’illustration parfaite. Par quelle force extraordinaire continue-t-elle de s’ouvrir à la lumière du jour ? Comment se fait-il qu’elle parvienne à s’extraire du givre quand toutes les autres ont gelé ? Dire que je reste pétrie de froid des heures durant malgré les superpositions de pulls. J’ai beau envelopper ma solitude de cachemire, d’écharpes et de gants, elle ne cesse jamais de me tenir froid. Je dois me rendre à l’évidence : je suis moins résistante que la rose rouge qui habite notre cour.
L’hiver a encore décidé de s’en prendre à mes lèvres. Chaque année, il s’ingénie à les fendre, malgré le soin que je prends à appliquer du baume matin et soir. Ça tiraille un peu la bouche lorsque je souris. Heureusement pour moi, les raisons de sourire se font de plus en plus rares, comme quoi la vie est quand même bien faite !


Extrait de Celsius en commande via ce lien : http://editions-mutine.over-blog.com/…/celsius-d…

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2 commentaires

    1. je vais aller voir ca vient peut être du navigateur il vous faut vider le cache ( vider l’historique en fait )…Chez moi le lien fonctionne ca arrive que non et la je vide lol merci encore de votre fidélité en esperant que ca marchera et que vous pourrez acceder au blog

      Aimé par 1 personne

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