Henri Merle – Histoire de Petit Coucou qui avait le hoquet, un conte pour les petits ( et les grands )

J’ai gardé ce portrait d’Henri, laissé au présent, parce que les poétes, les amis ne meurent jamais…Ils s’en vont juste ailleurs, tutoyer les étoiles au Paradis des Artistes…Mais ils restent présents, bien vivants parmi nous. Leurs textes, les œuvres sont là pour témoigner de leur éternité et dans nos coeurs le leur continue de battre à l’infini…

Henri Merle fume la pipe. Sa silhouette dégingandée se détache, pensive, sur fond de crassier stéphanois. Car l’homme est de Saint-Étienne depuis toujours. Il y traîne ses savates du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, avec vélocité. Il broge. Il se prépare, il anticipe. Déjà un nouveau texte germe dans sa caboche d’insatiable rêveur. Il affectionne tout, monsieur Merle. Tous types de textes. Tout genre littéraire. Pour peu que les mots y aient la part belle. Pièces de théâtre, contes pour enfants et contes pour adultes, écriture et composition de chansons, jusqu’au roman noir avec son inénarrable héros, Chickago Riffer (croque-mort à Lost Angeless et détective à ses heures perdues). Pour l’heure, il rédige un scénario de western « très à l’Ouest ». Il s’investit aussi au théâtre dans la compagnie des Brankignols, basée au 36 rue Badouillère, Saint-Étienne. Il joue notamment dans la pièce Papillon actuellement à l’affiche. Il est également le président du Cercle des Lettres et des Arts (association stéphanoise de promotion des arts et de la culture sous toutes ses formes).Son style est enlevé, avec moult calembours, déployant une grande imagination, avec une écriture libre, décomplexée, poétique, drolatique, où l’argot est souvent mêlé au langage soutenu. Au cœur de son œuvre, son héros récurrent, Chickago Riffer, perpétue la lignée des Bob Morane, et autres San Antonio. Conformément à la tradition du roman noir américain, de belles créatures plantureuses tombent inévitablement sous le charme du détective justicier de Lost Angeless (la Cité des Anges perdus).

Pour terminer cette hommage à Henri voici l’histoire du  » Petit Coucou « , un conte  » soufflé par les anges  »

Illustration Cham

Il volait une fois un petit coucou qui avait le hoquet.
Un coucou, c’est un aéroplane, c’est à dire un avion d’un modèle très très ancien, comme l’on en fabriquait à l’époque de nos arrière-arrière grands mamans-papas.
Donc petit coucou avait le hoquet et hips ! Hoquet, chacun sait ce que c’est ( le hoquet existait bien avant les aéroplanes et existera toujours ).

Petit Coucou, en plus de son hoquet avait un ami, son seul ami vraiment. Cet ami, c’était son pilote, Charlie Matou, le chat poète, que l’on surnommait le cat à strophe. Personne n’a jamais su pourquoi.
Charlie Matou, avait trouvé un jour Petit Coucou en pièces détachées et rouillées, tout déglingué, au marché de la ferraille.
Charlie Matou acheta Petit Coucou déglingué, emporta les pièces détachées et, comme il était bricoleur, fit de Petit Coucou un avion quasi neuf.
– Tu m’as rendu ma dignité, mon honneur et ma, hips, jeunesse, fit Petit Coucou qui avait le hoquet. Veux-tu devenir, hips, mon, hups, ami, malgré mon, hops, hoquet ?
_ Okay, Petit Coucou, répondit Charlie Matou très ému, je serai ton ami.
Et Charlie Matou, aux commandes de Petit Coucou, vola longtemps, heureux dans le ciel bleu, dans le ciel noir et même dans le ciel gris.
– Vroum, hips, vroum, hops, accroche-toi bien, vroum, hups, disait Petit Coucou qui avait le hoquet.
A chaque hips, hyps, haps, ou hops, en effet, Charlie Matou manquait d’être éjecté, à cause des soubresauts dus au hoquet. mais Charlie était très fort : il tenait fermement le manche. Et puis Petit Coucou et lui étaient de vrais amis.
Un jour, Charlie Matou rencontra la petite chérie de sa vie, une jolie chatte qui s’appelait Caty Grace, et cette chatte-là était folle des aéroplanes.
– Je veux partir avec toi loin, loin dans le ciel, Charlie, au-delà de l’arc-en-ciel, plus haut que les derniers nuages !
– Okay, Caty, monte derrière, et laisse tes mains sur le manche !
Hélas, à cause du hoquet de Petit Coucou, Caty Grace fut éjectée de l’avion bien avant le septième ciel.
Heureusement, elle avait un parachute.
Caty Grace fut un peu vexée. Comme elle était très fière, elle ne dit rien, mais Charlie Matou comprit bien qu’elle avait de la peine.
Charlie Matou proposa d’autres vols…
 » Mais à quoi bon, fit Caty… Tant que Petit Coucou a le hoquet, pas la peine que je dise okay… autant que je reste sur le quai ! « 
Alors Charlie Matou emmena Petit Coucou qui avait le hoquet chez l’aéropsy. Un aéropsy c’est un médecin très savant et très cher capable de soigner les aéroplanes malades dans leur tête. Pardon, dans leur moteur.
– Petit Coucou a dû éprouver une grande frayeur dans sa jeunesse, pendant une guerre de ces temps-là ou durant l’orageuse traversée d’un océan. Cette frayeur lui donna le hoquet. Seule une autre frayeur pourrait le guérir. Emmenez voler Petit Coucou dans la vallée de la Grande Trouille ! Bon, voilà : mon tarif, c’est trois sacs d’or… Client suivant !
Charlie emmena donc voler Petit Coucou  dans la vallée de la Grande Trouille,vallée horrible située bien au-dessous du niveau de la mer. Au fond de cette vallée hurlait un monstre hideux, à guérir tous les hoquets du monde.
– Beuark, prout, kakaculotte ! hurlait le monstre, un vrai mal poli.
Mais quand ils remontèrent de la vallée de la grande Trouille, Petit Coucou souffrait toujours de son hoquet.

 Henry Merle
Histoire soufflée par les anges
( espèce en péril )


Et Charlie Matou avait lui aussi contracté le hoquet à la vue de l’effroyable monstre.
Alors Charlie laissa petit Coucou dans son garage. Il oublia son ami qui commença à rouiller dans l’hélice et à se couvrir de toiles d’araignées.
Bien sûr, il allait le visiter parfois, en compagnie de Caty Grace, mais plus par politesse que par amitié.
– Comment vas-tu, hips ? demandait Charlie.
– Pas trop mal, hops, mais le temps est humide, et le temps me ronge, hips, répondait Petit Coucou.
Un jour qu’il passait devant le garage, Charlie n’entendit plus hoqueter son ami. Il se précipita vers lui.
– Petit Coucou, Petit Coucou, tu n’es pas mort ? réponds-moi !
Petit Coucou était tout rouillé, ses pièces se détachaient, son hélice se déglinguait, ses ailes pendaient lamentablement.
– Non, je vis encore un peu, et si je n’ai plus le hoquet c’est parce que j’ai eu la plus grande peur de ma vie, peur que tu ne sois plus mon ami.
-Moi aussi, j’ai eu très peur, et tu seras toujours mon ami.
Alors Charlie répara Petit Coucou qui redevint quasi tout neuf.
un matin, Caty Grace dit à Charlie :
– Maintenant que Petit Coucou est à jamais guéri de son hoquet, est-ce que je peux partir avec toi pour de vrai, loin dans le ciel, Charlie, au- delà de l’arc-en-ciel, plus haut que les derniers nuages, okay, au quai ?
– Okay, Caty, monte derrière moi et laisse tes mains sur le manche !
Et c’est ainsi que Charlie Matou s’envola pour toujours avec Caty Grace quelque part, plus haut que l’arc-en-ciel, là où volent les oiseaux bleus.



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