J’ai au creux des yeux,
son visage tatoué,
Et le rire de l’enfant,
Qui ne l’a jamais quitté.
Je l’ai revu ce matin,
Dans les flots de la mer,
Et dans mon âme
Qu’il ne quitte jamais.
Je l’ai entendu,
dans ses ronrons écumer,
Dans le blanc de mes nuits,
Dans l’ecchymose de mes jours.
Ô mer, tes ressacs au goût de sel
Sont insipides,
Depuis que mon bateau est parti
À la dérive,
Depuis que le temps a déchiqueté,
ses voiles,
Les flots ont désormais un goût de fiel.
Une seule voix nous manque
Et l’on devient sourd,
À la vie en suspens.
À ce monde qui tourne,
Désertique
Désarticulé.
Il peut toujours chanter
Les jours s’égrener,
Lentement,
Sans raison,
S’immobilisent les heures,
Au point mort, s’arrête ainsi ma danse.
Comme un oiseau plumé,
Je l’ai rencontré, ce matin.
À l’entrée d’un cimetière,
Il gisait.
La vie, les rapaces ne l’ont guère
Épargné.
J’ai même vu des corbeaux autour
Jamais repus, de leurs becs, émietter,
Jusqu’au drap qui le couvrait,
Sous leurs barbes, riant comme des hyènes.
Les oiseaux ne meurent pas
De leurs blessures,
C’est la turpitude qui les achève.
Quelques pas les séparaient à peine.
Lui, sous terre, et le frêle oiseau tombé,
Dans la fange des Hommes, ils se sont pris les ailes.
Il est sur terre des hommes- oiseaux
Qui chantent à l’unisson, la paix dans l’univers,
Et puis il y a les corneilles à voix d’hommes,
Qui plantent leurs crocs dans la chair,
De ceux qui ne leur ressemblent pas.
Une seule voix nous manque
Et l’on devient sourd,
À la vie en suspens.
À ce monde qui tourne,
Désertique
Désarticulé.
