
La distance que les morts ont prise
N’apparaît pas d’emblée ;
Leur retour paraît possible
Et consume mainte année.
Et puis, nous nous doutons plus qu’à moitié,
Que nous les avons suivis,
Tellement nous sommes devenus intimes
Avec leur chère mémoire
La tombe est la chaumière
Où m’activant pour toi
Je mets en ordre mon salon
Et prépare le thé de marbre.
Pour deux séparés, pas longtemps,
Un cycle, peut-être,
Que la vie éternelle mettra
Vraiment face-à-face.
Le seul Fantôme que j’aie jamais vu
était vêtu de Dentelles, donc,
Il n’avait pas de sandales aux pieds,
Et allait comme flocons de neige,
Son Allure, inaudible, comme l’Oiseau
Mais rapide, de Chevreuil,
Ses manières, étranges, Hybrides
Ou peut-être de Gui
Sa conversation, rar
Son rire comme la Brise
Qui s’éteint en Fossettes
Dans les Arbres pensifs
Notre entretien, éphémère,
Lui, par moi, rendu timide,
Et Dieu m’a interdit de regarder en arrière
Depuis ce Jour terrible !
Voici ma lettre au Monde
Qui ne M’a jamais écrit,
Les simples Nouvelles que la Nature disait,
Avec une tendre Majesté
Son Message est confié
À des Mains que je ne vois pas,
Pour l’amour d’Elle – Doux – compatriotes
Jugez-Moi avec tendresse
Les Mourants se contentent de peu, Chère,
Un Verre d’Eau suffit.
Le Visage discret d’une Fleur
Pour habiller le Mur,
Un éventail peut-être, le Regret d’un Ami
Et la Certitude que quelqu’un
Ne verra plus dans l’Arc-en-ciel
Aucune couleur, quand tu seras partie.
Je suis personne! Qui êtes-vous ?
Etes-vous personne aussi ?
Alors nous faisons la paire !
Silence ! on nous chasserait vous savez !
Que c’est pénible d’être quelqu’un !
Que c’est commun comme une grenouille
De dire son nom tout au long de juin
Au marais qui admire !
Abaisse les Barrières, Oh Mort,
Les Troupeaux fatigués rentrent
Dont on n’entend plus le bêlement
Dont l’errance est suspendue
À toi la nuit la plus calme
À toi le Bercail le plus sûr
Trop proche pour qu’on Te cherche
Trop tendre pour être dite.
Traduction Patrick Reumaux (Lieu-dit L’éternité, Points Poésie)
