La douceur féerique
De ce chemin vert doré
Serpente langoureusement
Entre l’Allier
Et les bosquets opaques où sommeillent
Dans les odeurs automnales de mousse
La vipère
Et quelques lézards engourdis, apeurés.
*
Des arbres bordent le fil fragile de la vie
Par bouquets de quatre ou cinq, espacés,
Ou en familles resserrées.
Sur de petits promontoires naturels,
Jeunes chênes impétueux,
Nobles noyers, frênes légers,
Hêtres, bons amis ou libertaires.
*
Certains troncs paissent en un seul pied maître
Et dans une romanesque aisance
Déposent leurs branches avides
De lumière
Vers des nues prometteuses d’idéaux
Mystiques.
*
les murets aux pierres branlantes
Cherchent à poser le décor, ici et là,
Dans une taciturne pause
Mêlant le peu de fantaisie rustique
A une mélancolie tenace
terre de Sienne brûlée.
*
Des ombres s’échappent, fuient, fluides
Et distantes, lorsque les éperviers
Le long de la falaise habitée
Surveillent de loin les échappées belles.
*
Flânerie solitaire.
*
Mes pas écrasent les glands secs
Et glissent sur la rouille avantageuse
Des feuilles humides, déjà anonymes.
Témoin maigre et penché,
Un bois joue au vieillard timide
Ou au jeune éphèbe
Portant plumeau et glaive,
Chaque oeil interprète !
*
Les dernières petites plantes grasses
Bombées et duveteuses
Amènent des prolongations avec dédain
En de joyeux bouquets
Et de minuscules boutures semi-ouvertes
Comme autant de colliers
Engrangeant les derniers rayons du soleil.
*
Un petit sapin croît,
Des branchages protecteurs pleuvent sur lui,
Des zones dentelées tricotent des chilères,
Arrière-saison remplie de soupirs
En d’extases charnelles,
Seule, la substance divine…
*
J’entends l’Allier et ses innombrables
haleines moites.
*
Les fougères frissonnent dans les ombrages,
L’herbe se soustrait en une paisible démarche,
Croise ses verts avec les laves centenaires.
Les recoins murmurent des légendes
D’un lieu tenu secret des années durant.
*
Le refuge colle à ma peau,
M’habille à la manière d’un gant
Ajusté avec l’inutilité de posséder
Autre chose.
Je me noie dans la sphère champêtre.
*
Les trèfles aux pieds, le coeur au ventre,
J’épouse les arêtes rondes,
Filtre avec le pigeonnier en friche,
Retrouve la solitude de mes jeunes années
*
La banalité secrète d’être enfant unique
Entre les mûres fanées de mon pays.
