Le billet d’humour de Jacques Roux – Elles sont à mes pieds

J’ai toujours de la peine à me séparer de mes chaussures. En fin de course, je remarque que je les use toujours aux mêmes endroits. Je me les approprie au fil des kilomètres parcourus.

Mes chaussures sont un peu le reflet de mes travers. Elles sont le prolongement de moi. De la bonne assise qu’elles me donnent va dépendre mon humeur, mon désir d’entrer dans l’action ou mon envie de rentrer chez moi en les ôtant très vite.

Sans protester, mes chaussures vont où je vais, courent où je cours, piétinent où je piétine, glissent où je glisse. Elles freinent devant une vitrine qui m’accroche, elles rétablissent l’équilibre sur l’escalier roulant. Solidaires, elles s’endorment parfois au cinéma.

Je ne prends pas toujours le temps de leur faire une beauté avec cirage, brosse à reluire et chiffon doux. Quand je prends le temps, j’ai plus de soin pour elles à l’extérieur.

Mes chaussures ont leur vie. Elles s’expriment sur le trottoir. Elles ont leur mot à dire et ne s’en privent pas. J’aimerais les faire taire quand elles dialoguent avec le bitume. A cause d’elles, toute la rue doit savoir que je suis allé acheter des croissants avant qu’il fasse jour.

Quand on parlera de moi à l’imparfait, je ne veux pas que mes chaussures soient du voyage. On ne va pas condamner à l’immobilité éternelle des accessoires faits pour le mouvement. Si leur état est bon, qu’on les donne et qu’elles continuent la route. Quant à moi, si sous une forme éthérée je dois marcher sur les nuages, je m’en sortirai fort bien les pieds nus.

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