3.L’accueil

J’entends le tam-tam au fin fond d’une forêt ruisselante, un cœur qui bat, s’emballe…
La lune renversée danse avec lui…Tout se heurte aux parois de mes cotes. Le chant du bois transporte des messages de villages en villages, il entraîne les pas du sorcier, il est le chant des anciens Dieux couverts de plumes et de maracas…
Tout est musique…
Un masse enfantine m’encercle et accompagne de leur tendre voix les rythmes entraînants de la bienvenue. Les bras tendus, les regards rieurs, je faute au milieu d’eux…
Des noix de cola offertes dans une feuille jaunâtre, sont croquées…
Un goût aigre coule sur ma langue….
Je suis l’invité de la terre rouge, du bois, de la forêt, des rizières, des chants et des hommes…
Le matin

Les enfants se réveillent avec le soleil. Ils courent déjà, pleurent parfois d’un caprice matinal. Une femme balaie en chantonnant un air Kissi…
Enfin, un souffle de chaleur, une sonnette de vélo et l’immortel chant du coq surprend les premières lueurs du jour.
Tant de bruit, l’Afrique renaît chaque matin.
Le riz détrempé, pâteux est encore tout chaud, une touche de lait et l’appétit ouvre les paupières…
L’enfance
Enveloppé dans un pagne multicolore, le nourrisson s’endort au balancement d’une démarche lancinante.
Les seins écrasés par le poids, les reins cambrés en demi-lune, une jeune fille à l’âge de verre porte l’avenir.
En vierge superbe, la mère éloigne l’enfant de son tendre regard et de son cœur. Elle l’endosse comme un joli fardeau consacré à une innombrable famille, à un renouveau, à une demeure tribale.
L’école
Agenouillé sur les caillasses de la cour, il compte les douleurs que lui a gravée la chicote…
Son corps malaxé est appuyé contre le jour. Il semble accusé le soleil de lui avoir menti sur l’heure…Il est encore arrivé en retard…

Ici, on vit au rythme de la chaleur…
Au marché, ce matin, il a vendu des clous rouillés et quelques restes de craies empruntés sur les bancs de l’école.
Ses papilles se rappellent encore du goût sucré des petits glaçons colorés…
Comment lui reprocher d’avoir tué un lézard alors que l’on tue des lions ?
La maîtresse est en retard, elle relève l’enfant et le traîne jusqu’à sa classe éclatante de rires enfantins…
Peut-être sera-t-il à l’heure demain… Peut-être…
Photos JL