Ma petite Philo, Aurore Bessy : Propos sur les vacances – André COMTE-SPONVILLE

Bonjour chers amis lecteurs, voici venu le temps des vacances pour certains, aussi j’ai pensé à vous proposer, dans la rubrique « Ma petite philo » ces quelques propos sur les vacances, recueillis dans l’excellent ouvrage du philosophe André COMTE-SPONVILLE dont le titre est le « Goût de Vivre ». Philosopher pour tous, sans préparation, sans précaution et dans la langue commune : tel était le pari du philosophe ALAIN, dans ses célèbres « Propos ». Tel est celui d’André Comte-Sponville,  pour qui la philosophie est pour lui le contraire d’une tour d’ivoire

LES VACANCES


« Le propre du travail, a dit le philosophe ALAIN, c’est d’être forcé « . Cela en dit long sur les vacances. Mais forcé par quoi ? Par la contrainte de gagner sa vie, par le réel qui pèse et résiste, par le temps que cela prend, par la discipline que cela suppose, par la fatigue que cela entraîne…
Travailler pour le plaisir, ce n’est pas vraiment travailler, au reste qui le fait ? Qui n’attend un salaire, un profit, des honoraires, une récompense ? Même les bénévoles travaillent moins pour le plaisir lorsqu’ils travaillent, que pour une cause qu’ils croient juste. Et les artistes : travailleraient-ils s’ils ne visaient la beauté, le succès, la gloire peut-être ? C’est bien ainsi. Le travail n’est pas une fin, c’est un moyen. Au service de quoi ? Au service du plaisir, du loisir, de la vie, de la liberté… 
Le propre des vacances c’est le temps libre, et cela en dit long sur le travail !

De cette liberté qu’allons-nous faire cet été ? Nous reposer, dormir, lire, voyager, nous occuper davantage de nos enfants, voir de beaux paysages, pratiquer un sport, réfléchir, discuter, visiter quelques musées, châteaux, ou églises… VIVRE en un mot. Cela devrait suffire. Cela ne suffit presque jamais. Qui ne s’ennuierait si cela devait durer tous les jours ? Qui ne s’angoisserait, s’il n’en voyait pas le bout ? 
C’est aussi pourquoi l’on travaille : pour gagner sa vie et puis pour l’occuper…

Pascal

Cela donne raison à PASCAL , philosophe , physicien et théologien français qui dit  » tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre ». Tout le malheur, mais aussi tout le bonheur !!  Le travail est un moyen d’oublier qu’on va mourir, d’oublier le peu qu’on est, le peu qu’on vit, le peu -ou le rien – qui nous attend… C’est un remède contre l’angoisse existentielle. 
Le travail fait un divertissement d’autant plus  efficace qu’il fatigue davantage, nous faisant souhaiter le repos que nous ne saurions autrement supporter et qui devient au contraire délectable, grâce au travail, « un divertissement de plus » .  Car notre humanité a horreur du vide.

Dès que la fatigue s’atténue, l’ennui renaît, puis l’angoisse. On ne va pas passer un mois à bronzer sur la plage ! C’est aux loisirs alors de nous divertir, de nous étourdir, de nous éloigner à leur tour de l’essentiel et surtout de nous. De là, ces vacances hyperactives que choisissent certains, où les journées sont aussi remplies que pendant l’année et aussi vides. Tennis, le matin, visites enchaînées l’après-midi et danse ou spectacle le soir…
PASCAL a tout dit  » ils croient chercher sincèrement le repos et ne cherchent en effet que l’agitation ». Ne pouvant se rendre heureux, ils essaient d’oublier qu’ils ne le sont pas. 
Alors que faire ? Prendre le temps de s’ennuyer un peu, de méditer un peu, prendre le temps de respirer, de souffler, de ne rien faire ! Regarder sa vie en face et aussi sa mort. « Faire le point », comme on dit, s’interroger sur le chemin parcouru et sur celui qui reste. ..ne plus faire semblant.  Ne plus raconter des histoires. Accepter le vide, l’angoisse, bref accepter  » la vacance… »

A. Comte-Sponville

Est-ce nihilisme, ? Abandon ? Paresse ? Je crois au contraire que cette méditation renvoie chacun à ce qui compte vraiment : l’amour, le courage, la beauté du monde, la fragilité de vivre, une certaine idée de l’humanité et de soi, les enfants à élever si on en a, le besoin d’agir ou de créer, une trace à laisser peut-être, un peu de bien à faire, avant de mourir, tant de maux à combattre…
A quoi bon autrement le travail ? Et à quoi bon vivre ?
Et pour terminer sur une citation d’ALAIN :  « L’oisiveté est mère de tous les vices, mais de toutes les vertus aussi ». La civilisation des loisirs, c’est la civilisation même…

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