Mouvements philosophiques des XIX^e et XX^e siècles (2) – Pierre-Joseph Proudhon (1809- 1865) – Carmen Montet

Le XIX^e siècle voit naître les philosophes révolutionnaires tels que Proudhon, Marx, Hegel et Bakounine préconisant l’émancipation des travailleurs qui doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes par la prise en main des outils de travail et ce afin de s’émanciper et se libérer à terme de la tutelle des classes dirigeantes et possédantes (les exploiteurs). Le but étant, à terme, la création d’une société plus juste pour chacun. Ce réveil des peuples ne se fera pas sans heurts et s’accompagnera de grèves, de révoltes ouvrières et même de révolutions (Commune de Paris). Le XIX^e siècle est certes le siècle de la révolution industrielle mais aussi celui de la prise de conscience du monde ouvrier face au capital. Les ouvriers prennent conscience de leur condition et s’unissent (mines, usines, chemins de fer) afin de mettre en place les conditions d’un monde meilleur. Ainsi naissent de nombreuses associations, syndicats (1886 – Création de la Fédération nationale des syndicats ( FSN ), 1895 – création de la CGT à Limoges ), caisses de secours et Internationales des travailleurs. 

En France , Pierre-Joseph Proudhon (1809- 1865) est l’unique théoricien révolutionnaire du XIX^e siècle à être issu du milieu ouvrier. Autodidacte, penseur libertaire et partisan du mutualisme, précurseur de l’anarchisme ( « La liberté est anarchie, parce qu’elle n’admet pas le gouvernement de la volonté, mais seulement l’autorité de la loi, c’est-à-dire de la nécessité« , 1840 ), il écrira plus de soixante ouvrages dont plusieurs sur la propriété (« Qu’est-ce que la propriété ? ou Recherche sur le principe du Droit et du Gouvernement » ) et rend célèbre la formule « La propriété, c’est le vol ». Sa théorie repose sur la thèse que la société est fondée sur l’existence de réalités contradictoires.

Ainsi la propriété, qui est le symbole de l’inégalité et en même temps l’objet même de la liberté.

De même, l’industrialisation des techniques accroît la productivité mais soumet l’ouvrier.

La liberté même, bien qu’indispensable, est source d’inégalité.

A Lyon , où il travaillera dans les années 1840, il  fréquente les associations mutuelles ouvrières, marquées par les révoltes des Canuts de 1831 et de 1834, de là lui viendra le nom de « Mutualisme » pour son système au sein duquel il est persuadé que l’homme n’a besoin ni de chefs ni de maîtres pour s’épanouir et vivre en harmonie.

Ami de Karl Grün, Michel Bakounine et Alexandre Herzen, qu’il côtoie lors de ses séjours à Paris, Proudhon fait la connaissance de Karl Marx en 1843. Si au début les deux hommes semblent s’apprécier, très vite des différences de point de vue inconciliables naissent. Proudhon ne veut pas la mise en place d’un nouveau dogme et refuse de poser l’acte révolutionnaire comme moyen de réforme sociale  : « Il ne faut pas, comme l’a fait Luther, créer un nouveau dogme, tout doit pouvoir être toujours remis en cause : « Ne nous posons pas en apôtres d’une nouvelle religion ; cette religion fût-elle la religion de la logique, la religion de la raison. Accueillons, encourageons toutes les protestations ; flétrissons toutes les exclusions, tous les mysticismes ; ne regardons jamais une question comme épuisée, et quand nous aurons usé jusqu’à notre dernier argument, recommençons s’il le faut, avec l’éloquence et l’ironie », répond-il à Marx lorsque, en 1846, ce dernier lui propose d’être son correspondant en France. A partir de là, c’est la rupture et l’affrontement de deux socialismes que tout oppose.

Théoricien du socialisme révolutionnaire, Proudhon préconise de supprimer la propriété privée et le Grand Capital, sources de toutes les inégalités, et propose de remplacer l’État par un fédéralisme. Théoricien de l’anarchie, pour lui la pensée philosophique n’a d’intérêt que si elle est l’écho du peuple et de sa révolte pour la liberté et la justice.